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Carcassonne
Et soudain elle est là,
dressée devant moi,
superbe, élancée,
parée de reflets blonds
dans le soleil couchant.
Elle brille, éblouissante.
Elle rit, éclatante.
Elle me joue des tours,
me conte des légendes:
fables de sorcières,
chants de troubadours,
des histoires de Comtes,
Vicomtes et Chevaliers.
Puis elle s'assombrit,
l'inquiétude voile ses yeux.
Une tour tragique se dessine.
Elle me chuchote alors à l'oreille les tortures
et autres supplices
pratiqués en ce lieu.
Récits d'intolérance,
Fanatisme, hérésie.
Tour à tour, elle a connu
Romains, Wisigoths, Sarrasins,
Mérovingiens, Carolingiens...
Du haut de ses deux mille ans
elle veille, imprenable,
fidèle à son surnom :
Pucelle du Languedoc.
© Mireille 27/7/2000 modifié le 14/11/02 |
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16 avril 2006
La petite saison de pluie semble finie. Depuis quelques jours les averses journalières
ont fait place au grand ciel bleu. L'air est sec et tiède. Il y a comme
un air de fête. Les oiseaux s'en donnent à cœur joie. C'est
un défilé de hautes couleurs qui traverse le jardin. Un ballet
vif, aérien, léger comme une plume. Une danse rythmée
par des trilles, tirelis, sifflets, coucous et autres sons intraduisibles,
car ici les oiseaux ne parlent pas le même langage. Les graves des rapaces,
les aigus des tisserins, rolliers et autres colibris se mêlent en une
joyeuse symphonie.
La fête est aussi dans la rue. Une multitude de gens drapés de
châles blancs, la tête ceinte d'un fin cordon en fibres de palme
s'avance vers l'une des nombreuses églises de la ville. La chaussée,
les trottoirs sont blancs de monde. Seuls les taxis donnent une note colorée,
une touche bleue au milieu de la foule. Des chants s'élèvent.
Je ne comprends pas l'amharique. Je ne comprends pas ce rite religieux.
En ce 16 avril, mon calendrier indique Pâque. Les cloches ne sont pas
là. Les œufs, les poules, les agneaux encore loin des assiettes.
Fasika, la Pâque des chrétiens orthodoxes, se fêtera le
30 avril. La fin de 55 jours de carême approche. Dans les cours on prépare
les animaux qui seront sacrifiés.
Aujourd'hui chacun se réjouit.
© Mireille, Addis Ababa, le 16 avril 2006 |
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Xamayca (île
qui m'est inconnue)
J'ai jeté la photo d'île paradisiaque,
le palmier sur la plage n'étendra plus son ombre,
l'eau turquoise foncé a emporté, par le fond, la dentelle d'écume
qui ourlait le sable rose de Long Bay.
Je n'aime pas les clichés.
J'ai déchiré les pages-recommandations destinées aux touristes
et suis entrée dans Kingston.
C'est dangereux, misère, insalubre.
C'est pittoresque, coloré, rythmé.
Kingston Town, te souviens-tu avoir dansé sur cet air de UB40 ?
Le vieux quartier de Trenchtown vit au rythme du reggae.
J'ai fermé les yeux sur les portraits des idoles,
sur les façades, vert, jaune, rouge, les trois couleurs de Zion,
Ethiopia, terre promise, terre des visages brûlés.
Ras Tafari, the Jah, le Dieu vivant
J'ai tourné le dos à la ville,
j'ai suivi Peter vers l'intérieur de l'île,
vers les sommets de ses Montagnes Bleues,
vers ses îlots de verdure, écrins protecteurs des esclaves marron.
Un sentier envahi de végétation
Des myriades d'oiseaux,
Des rampants qui détalent
Un chemin caillouteux vers la gorge profonde
Suspendue dans le vide, une petite plaine,
quelques cases, un village.
L'arbre du voyageur déploie son éventail,
des hommes arrivent chargés de cannes à sucre,
des femmes rient et bavardent,
les cabosses éclatent,
les fèves de cacao emplissent les paniers,
les baba figues promettent d'abondantes récoltes.
La nuit tombe vite, une fine pluie la suit
Il fait tiède
C'est l'heure où les chauve-souris sortent de leur léthargie
A l'abri sous un auvent de tôle, je pense à Christophe Colomb
:
" La plus belle île jamais vue : montagneuse.... avec des vallées,
des champs et des plaines"
Oui Xamayca est belle, et beaux étaient les Arawaks
Qu'en avez-vous fait !
Et vous, les "massa", vous fallait-il aussi importer tout un peuple,
de la lointaine Afrique !
L'odeur du maïs grillé et de la soupe de légumes
Une voix qui s'élève sur un rythme saccadé, me tirent
de ma rêverie
Ils sont là mes amis
La fumée de leur pipe se mêle au feu de bois
Je ne dirai rien sur les chanteurs rebelles, les dreadlocks, les bonnets tricolores,
la ganjah, l'anglais créole… ça fait cliché.
Je n'aime pas les clichés.
Dois-je vous dire que j'ai ramené, dans ma "Babylon", une
Cutchie, pour compléter ma collection de pipes ?
© Mireille le 7 avril 2007 |
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Essaouira
Une grappe de barques au pied des remparts de pourpre.
Bleues, vertes, rouges, toutes en bois, construites à l'identique depuis
des siècles.
La dernière vient de s'amarrer le long du quai.
Les poissons déchargés dans une carriole.
Les filets turquoise mis à sécher sur le ciment gris.
Trois hommes, poussant, tirant, hissent le chargement le long du plan incliné.
Un goéland s'échine à extraire d'un panier d'osier une
sorte de murène jaune tachetée de noir.
Une mendiante vient quémander un maigre repas parmi les rares poissons
impropres à la vente.
Les autres, les sardines, feront le délice des amateurs de musique venus
assister au festival des gnawa.
Ne sens-tu pas l'odeur de grillade poussée par
le vent du large qui s'engouffre dans les ruelles de la ville ?
Les mouettes l'ont déjà flairée qui tourbillonnent à l'affût
de quelques gourmandises abandonnées dans les assiettes en carton des
restaurants improvisés le long du port.
© Mireille, le 6 février 2007 |
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Les Saintes-Maries-de-la-Mer
Les Saintes-Maries-de-la-Mer où j'ai vécu est une ville,
petite ville aux mille facettes.
Les Saintes, comme on l'appelle, est cernée par les eaux. Eaux
salée
de la mer, étangs, roubines saumâtres, marécages.
Du sable. Sables mouvants des alluvions du Rhône.
Terre craquelée, stérile. Sansouiro parsemé de salicornes,
roseaux, arbustes rabougris sur lesquels souffle le Mistral.
Aux Saintes-Maries tout est fait pour résister au froid, à la
chaleur, au sel, aux assauts du vent.
Son église fortifiée, ses petites maisons basses, ses cours
fermées.
Les habitants des Saintes sont ouverts. Ici on blague, on se chine. La
galéjade est un sport de l'esprit. On rit, on se moque, on prend
des risques.
Des amours s'inventent : Mireille et Vincent
Des peuples s'y rassemblent. Les fils du vent viennent y honorer Sara
la noire, leur sainte patronne.
L'âme du Marquis flotte sur la ville. Baroncelli !
Saintes-Maries-de-la-Mer, capitale de la Camargue, cité des taureaux,
des chevaux, des oiseaux.
Colonie de flamants sur l'étang du Vaccarès.
Gardians et manadiers dans leur cabanes au milieu des marais.
Aux Saintes, on s'aime, on aime, on vit intensément. Il sera toujours
temps de s'en remettre à Marie Jacobé, Marie Salomé
et leur servante Sara qui attend dans la crypte de l'église.
© Mireille 12 janvier 2006  |
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