10 janvier 2014, je reviens en Thaïlande pour visiter
le Nord. La Thaïlande du nord est une autre Thaïlande, loin
des plages de sable blanc et des lagons turquoise. Ceux qui viennent
ici sont attirés par le côté archéologique.
Après une nuit à Bangkok j'emprunte le chemin, ferré en
l'occurence, qui remonte vers le Nord du pays et dans le passé du Royaume
de Siam.
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Cette carte couvre les deux voyages en Thaïlande
Le sud en 2010, le nord en 2014
.
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sur les images de cette page, presque toutes donnent une
vue très élargie
Phra
Nakhon Si Ayutthaya, deuxième capitale de la Thaïlande
qui s'appelait alors Royaume d'Ayutthaya. C'était il y a bien longtemps
en 1351. En 1767, les Birmans ont détruit la ville.
Sukhothaï fut la première capitale du Royaume du même nom, de 1238 à 1438.
Là encore il ne reste que les ruines et quelles ruines ! On navigue
entre de nombreux bassins miroirs des vestiges de temples, de palais
royaux, de stupas, de statues et où s'épanouissent nénuphars
et lotus, parfois visités par des hérons et autres oiseaux.
Ces deux sites s'étalent sur plusieurs kilomètres et différents
lieux. A vélo et à pied, il ne faut pas craindre la fatigue ni
la chaleur pour parvenir à en faire le tour. Une journée est le
strict minimum pour se remplir les yeux et le coeur de toutes ces merveilles,
inimaginables parfois et protégées par l'UNESCO.
Après ces incursions dans les temps reculés,
je poursuis ma route vers Chiang Mai.
La deuxième
ville du pays est très agréable, aérée, avec
là aussi
une partie ancienne entourée de douves et de restes
de remparts. Le trafic se fait hors les murs, dans un seul sens. C'est
bien pratique pour se repérer et traverser. La circulation prend
parfois d'intenses tournants où se mêlent voitures individuelles,
vélos, motos et taxis de toutes sortes du tuk-tuk, aux autos en
passant par les songthaews.
Chiang Mai c'est quelques 300 temples ! Je n'en ai pas vu le dixième,
mais j'y ai découvert et appris beaucoup. Par exemple qu'il y
a un Bouddha pour chaque jour de la semaine. Pour connaître votre
Bouddha, vous devez connaître le jour de votre naissance. Le mien
est celui du lundi : il est debout, la main gauche pointe vers le sol et
la paume de la main droite tendue vers l'avant en signe d'absence de crainte,
d'apaisement, de protection, de bienveillance.
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Après six jours passés
ici, seule ou avec Ilona, une Suissesse qui partage le dortoir avec
deux Chinoises et moi-même, je poursuis
ma progression vers le Nord. En bus cette fois.
Les herbes folles occupent les bords de la route, les lantanas
et autres plantes tropicales ajoutent une touche de couleur. Les rizières
sont pleines d'eau ou en jachère. Les pelouses des terrains de
sport sont bien tondues, mais c'est plutôt l'herbe sèche
qui domine. La saison des pluies est terminée, c'est l'hiver en
Thaïlande
mais les manguiers, bananiers et autres fruitiers ne semblent pas manquer
d'eau.
Quatre heures plus tard, voilà Tha
Ton.
Les montagnes surplombent le village et la rivière Mae Kok (un
affluent du Mékong)
qui serpente dans la vallée. Des pagodes retroussent le bord de
leur toit, des stupas pointent ici et là au milieu de la forêt
qui héberge
aussi de gigantesques Bouddhas.
Je monte au temple Tha Ton. Neuf
points importants jalonnent la route : sanctuaires, école
bouddhiste fréquentée par de nombreux jeunes moines,
le village des moines avec ses petites maisons de 8
m2, pas plus, posées sur pilotis, un énorme Bouddha
blanc, un autre doré
assis sur le nâga (serpent sacré enroulé) qui déploie
sa tête en sept gueules menaçantes et un immense bouddha
du mercredi
avec sa coupe prête à recevoir les offrandes. Au sommet de la colline trône
le chédi (stupa). A l'intérieur une rampe en ellipse
permet d'atteindre différents
niveaux, salles de prières et
une exposition de pièces de musées (photos de moines,
statues diverses) De la terrasse la vue
s'étale
sur les rizières, les méandres de la rivière,
les petits villages perdus dans la montagne
à deux
pas de la frontière birmane. Au dernier étage
c'est le paradis céleste.
Demain je reprends mon périple soit par la rivière jusqu'à Chiang
Rai, soit en bus vers le Triangle d'Or. Après maintes hésitations,
j'abandonne la rivière aux touristes qui ne viennent à Tha
Ton que pour la descendre.
Je choisis la route toujours
plus au Nord. Cette partie de la Thaïlande
a été un
lieu d'immigration pour les Birmans et les Chinois qui fuyaient la guerre.
Mae Salong est une de ces
villes peuplées de Chinois venus du Yunan, anciens militaires qui
ont fui la Chine à l'époque du Kuomintang. Difficile ici
de se repérer et de communiquer. Ecriture chinoise et thaï.
Quant à l'anglais il n'est que rarement compris et parlé.
Cette population, ainsi que des ethnies qui viennent des pays limitrophes,
s'est tournée vers la culture du thé. Ça
sent bon, c'est joli. Les plants de thé épousent le flanc
des montagnes depuis les crêtes jusqu'au fond des vallées.
Le printemps s'avance tout doucement, les arbres sont en fleurs. J'ai
passé une journée à marcher de village en village.
J'ai rencontré les gens qui y vivent, dans des maisons en bois
et toit de paille. J'ai croisé une vieille femme Akha qui m'a
entraînée chez elle. Echelle branlante, terrasse en fines
planches qui craquaient sous mon poids. J'ai admiré ses créations
d'art traditionnel. Bien sûr elle espérait me vendre quelques
objets. Je n'ai pas voulu la décevoir et si j'ai refusé ses
bonnets et ses guêtres, je suis partie avec un petit sac couvert
de perles.
Il est encore trop tôt pour passer au Laos. Je quitte la
proximité du triangle d'or. Après un
passage éclair à Chiang
Rai, histoire de faire des photos d'identité conformes pour mon
futur visa, je fuis la grande ville bruyante pour les régions
calmes et peu touristiques du Nord-Est : Phayao au bord de son lac
et Nan au bord de sa rivière.
Phayao et un vélo, c'est le bonheur. Le lac est immense, pas question
d'en faire le tour complet. La ville elle-même est proprette. Ses
maisons en bois dont certaines très anciennes sont bien entretenues.
Et puis comme partout en Thaïlande, les temples. Je n'en ferai pas
le tour. J'entre
dans le Vat Si Khom Kham qui contient un imposant Bouddha du XVè-XVIè siècle.
Dans un coin de la cour se cache l'enfer. Jugez vous-même.
Qui dit lac
dit poissons. La pêche
et l'élevage. Il y a en limite de la ville, un grand centre de
recherche, de conservation et d'élevage de poissons d'eau douce et notamment
du
Mékong. L'aquarium contient de nombreux spécimens dont d'énormes
poissons-chats.
Nan et sa rivière
du même
nom sont célèbres
pour les régates de pirogues qui ont lieu chaque année à la
fin de la saison des pluies et cela depuis des temps... depuis longtemps.
Janvier n'est pas la période
des courses, je me contente d'admirer ces très longues
et étroites embarcations, élégamment laquées.
Une tête
de nâga (serpent) comme figure de proue. La queue de cet animal
fabuleux prolonge la poupe.
La pirogue de la queue à la
tête
J'abandonne
les barques au repos sous leur hangar ou dans les cours de temples car
ces
long-boats sont plus ou moins sacrés,
j'enfourche un
vélo pour le plaisir et la rapidité afin de visiter la
ville, ses nombreux monuments et ses environs. Je découvre le
Vat Phumin, un petit temple entièrement
peint qui n'était pas sans me rappeler Abreha Asbeha, la fameuse église
du Tigré éthiopien. Il y a aussi le Vat
Ming Muang, un temple tout blanc avec des sculptures en stuc et assorti de
statues qui exhalent le bonheur de pratiquer la musique.
Retour à Chiang
Rai
Le bruit ce soir est différent, il s'apparente plus à du
tapage. Des pétards semblent venir des quatre coins de la ville...
puis au bout de la rue, des coups
frappés sur un tambour
accompagnent des silhouettes équestres qui esquissent des pas
de danses, se trémoussent,
se cabrent au rythme des percussions. Ce 31 janvier 2014 marque le nouvel
an chinois. L'année du cheval commence.
Je
laisse les hommes et les femmes en rouge animer les rues. Je m'en vais
fêter ça à ma
manière avec un bon repas. Après un jus de pastèque,
un plat très riche en protéines, une portion
de riz et pour terminer une galette chaude de riz noir au sésame et
saupoudrée
de sucre brut. Tout cela acheté au fur et à mesure des échoppes
qui s'ouvrent sur le marché de nuit. J'adore les marchés de nuit,
les couleurs et les parfums qui se dégagent des plateaux de nourriture
variée. J'adore découvrir de nouveaux mets et ce soir me voilà
ravie de mes découvertes : larves et grillons frits ! Comme s'il n'y
a pas de choses plus appétissantes en Thaïlande, me direz-vous
! Mais oui bien sûr, d'ailleurs à longueur de journée,
les épices,
arômes incitent à s'asseoir pour déguster une copieuse
soupe ou un pad thai, ou encore un de ces poissons d'eau douce, conservé dans
le gros sel et passé au barbecue avec dans le ventre une énorme
poignée
d'herbes aromatiques enveloppées dans une feuille de bananier.
La chair est délicate,
fondante comme de la crème. Et tous les jus de fruits mêlés à de
la glace pilée. De loin, ce que je préfère, est le ice
green tea. Une préparation glacée à base de thé vert
et autres ingrédients...
Avant de quitter définitivement Chiang Rai je m'en vais faire un tour
au jardin botanique. Le soir tombe mais les lys sont encore grandement ouverts
et exhalent leur parfum entêtant, les succulentes, toutes épines
dehors, s'étirent sur le sol, les cascades d'orchidées dévalent
les clôtures
du parc. De petits lumignons multicolores s'allument dans les arbres. La
nuit sera belle.
Ici trois pays se rencontrent, exactement au confluent de la rivière
Ruak et du Mékong. On aurait pu appeler ce lieu des 3P : Laos,
Thaïlande, Myanmar. Il se nomme Triangle d'Or.
La
fièvre de l'opium a disparu, l'or est sur les Bouddhas. L'un d'eux
se pavane sur un bateau factice. Ici pas un pétale de pavot ni
de son cousin le coquelicot. Epoque révolue, mais quel site touristique
! Plus touristique que ça ... On y vient de partout (Thaïlande,
France, Québec, Chine...) Les barques attendent les touristes.
Une vague en Birmanie, une autre au Laos avant de reposer les pieds au
royaume
de Siam.
A Mae Sai, la rivière
Ruak sépare le Myanmar de la Thaïlande.
Un pont enjambe la rivière. Le poste frontière est là emprunté
par un flot de piétons, autos, camions. Après le pont c'est
tout de suite Tachileik comme un prolongement de Mae Sai. De ma chambre
j'entends les
rires, je vois les jeux des jeunes du village birman.
Golden Triangle : nous sommes à 33
kilomètres en aval de Mae Sai, le musée de l'opium
est à 1km
de là dans un grand parc soigné, une vaste clairière
au milieu de la jungle où des canaux courent entre étangs
et bassins. De gros oiseaux, une variété de canards,
déambulent
autour d'arbres mis en forme à coups de sécateurs.
On se croirait presque dans un jardin anglais ou à la
française.
Chiang Saen n'est
qu'à 10
km en aval. Quelques
coups de pédales
suffisent et encore d'autres pour faire le tour de cette ancienne ville,
à la recherche des vestiges des fortifications et de nombreux
temples d'époques différentes comme on le remarque en observant
les vestiges qui peu à peu
sont restaurées.
Le Wat Chedi Luang et son chedi octogonal. Une rareté. Et d'autres
encore à degrés carrés ou à géométrie
variable.
C'est à Chiang Saen que j'ai rencontré Berthe
la Québécoise et Michelle la Française. Le groupe
n'a pas arrêté de s'agrandir. Deux jours plus tard à Chiang
Khong nous étions sept francophones et le lendemain nous sommes
entrés au Laos à 12. Nous avons investi tout l'avant du
bateau, là où les sièges se font face.
...mais pas
trop vite ! car après deux mois passés au Laos, je
reviens en Thaïlande. A Ubon Ratchathani, je prends le train
de nuit jusqu'à Bangkok. Quelques heures d'attente
à Ubon m'ont permis de bavarder avec cette charmante dame qui, à un
jour près, a le même âge que moi.
Une couchette à l'étage supérieur, il fallait bien ça pour franchir
les 600 km sans fatigue pour l'équivalent de 15 euros !
Le 28 mars au point du jour, j'arrive à Bangkok. La ville ne m'est
pas
étrangère. Je sais maintenant où je dois prendre
le bateau-bus pour aller dans le quartier qui regorge de touristes mais
où il est facile
de trouver des endroits calmes et peu onéreux.
Je reste ici le temps de faire réparer mon ordinateur. Sur le
chemin de la boutique je découvre le Sao Chingcha, une balançoire
géante qui
se dresse au milieu de la circulation. C'est un monument assez vieux,
en bois. Je ne sais pas si ce giant swing est encore opérationnel.
Le
1 avril je quitte Bangkok pour Kuala Lumpur. Il me faudra 36 heures de
voyage et pas moins de deux trains de nuit pour
arriver dans la capitale malaise. Les couchettes sont confortables, la
literie propre, la température modérée. Tout est
réuni pour un voyage
long mais sans fatigue.
La
veille de mon départ, je suis passée devant une bibliothèque
peu ordinaire. Ici on ne met pas les wagons au rebut, ils sont recyclés.
Ceux-là finiront
leur vie en compagnie de gens qui voyagent dans les livres.