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Quand on arrive à Sana'a, la capitale, on est tout
de suite plongé dans un autre monde. Une ville sortie d'un rêve.
On pense qu'on va se réveiller d'un moment à l'autre, mais
il faut se rendre à l'évidence, ici c'est comme nulle part
ailleurs. Imaginez des maisons-tours, sortes de gratte-ciel ocre, construits en briques de terre, avec des décorations de stuc et des vitraux. Chaque tour est une maison de famille. Quatre, cinq, six étages, avec un escalier qui s'enroule autour d'un pilier central. Et quel escalier ! raide, étroit, avec des marches irrégulières pouvant atteindre 40 cm de haut. Mon hôtel était dans une de ces anciennes maisons. Je ne vous dis pas l'état dans lequel on arrive à la chambre : essoufflé et le coeur qui bat à tout rompre. Mais de là-haut, le panorama sur la ville est magique. La nuit, les lumières illuminent les qamariyya (vitraux en demi-lune, disposés au-dessus des fenêtres). Le matin, le réveil est en couleur et en musique aussi car il y a toujours un muezzin pour pousser sa chansonnette. Pays des mille et une nuits, c'est certain. |
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Encore plus haut, il y a le toit en
terrasse. Toute une ville à vos
pieds, avec ses maqshamas, vastes jardins potagers, souffle vert au milieu
des constructions. Les ruelles du souk serpentent entre les boutiques.
L'animation est grande, mais à midi, à l'heure de la prière,
tout semble se figer et vous assistez alors à un concert. Imaginez les haut-parleurs des nombreux minarets qui diffusent chacun sa mélodie. Ca arrive de tous les côtés. L'harmonie est parfaite. Au loin, dans la brume de chaleur, se devinent les hautes terres. Si Sana'a est à 2350 m d'altitude, les plateaux de l'ouest s'étagent jusqu'à 3000 m. C'est là que mon chemin me mènera, vers les places fortes de la province d'Al-Mahwit et le Djebel Haraz. |
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Mais avant, je vous emmène dans
la médina. C'est là qu'il
faut venir s'imprégner des parfums d'épices, d'encens,
de myrrhe, goûter aux raisins secs, amandes, dattes, se rafraîchir
de tranches de pastèque, de mangues juteuses, éblouir ses
yeux des couleurs des tissus, des colliers d'ambre et d'argent, se laisser
porter par le flot des passants : quelques femmes enveloppées
dans leur "chirchaf" (voiles noirs) qui ne laisse entrevoir
qu'un beau regard brillant et une nuée d'hommes vêtus d'une "zanna",
longue chemise blanche, d'une veste sombre, portant le foulard blanc
ou à carreaux
rouge et blanc et toujours la "jambiya", poignard à lame
recourbée, glissée dans la large ceinture ouvragée. Les bonjours ! Hello ! How are you ? fusent autour de moi. Il est vrai que je suis la seule occidentale. Contrairement à d'autres souks en d'autres pays, ici aucun acharnement, aucune instance. J'observe à ma guise, je questionne, on me répond, c'est tout. |
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D'une ruelle à l'autre, je m'amuse à regarder
les enfants jouer sur le pavé avec rien, j'esquive une mule, une
brouette, j'admire la dextérité du ciseleur, je réponds à l'appel
joyeux d'une fillette "emprisonnée" derrière les
barreaux de sa fenêtre, tout là-haut. Je n'ai de cesse de
lever les yeux sur ces magnifiques façades, tant et si bien que
je m'égare. Pas pour longtemps, il y a toujours quelqu'un ou un
détail pour vous remettre sur le droit chemin. Ainsi le coin du
dromadaire où nuit et jour l'animal actionne en tournant en rond
la meule qui transforme les graines de sésame en huile. De temps
en temps il prend un peu de repos et assis au pied de son métier,
il mâche quelques bouquets d'herbe avant de reprendre sa tâche. |
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On mâche beaucoup au Yémen, les hommes surtout,
les femmes aussi et les enfants parfois. Comme un rituel, après
le repas de midi, ils commencent à enfourner dans leur bouche les
feuilles de qat, une plante euphorisante. De temps à autre une gorgée
d'eau. Plus on avance dans la journée plus la boule de feuille grossit
et déforme la joue. |
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L'animation est grande le jeudi soir.
Comparable à notre
samedi, les gens viennent faire leurs emplettes. Les commerçants
ambulants sont nombreux, sur la rue avec leur carriole, à même
le sol pour d'autres. Les femmes aussi sont là en grand nombre,
en groupe de deux ou trois. Comme en Europe, elles sont attirées
par les boutiques de tissus, de bijoux ou de vêtements. Demain
retrouvera son calme tout relatif car la médina est toujours animée. |
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Il est temps pour moi de quitter le
souk par la porte Bab-al-Yemen, de longer les remparts et d'aller voir
le wadi As-Sailah. Le lit de ce
cours d'eau intermittent a été pavé, endigué et
constitue un axe routier rapide. Mais ce soir le wadi coule et malgré le
flot, les véhicules continuent de passer et les gamins viennent
s'y tremper. La magie des couleurs, le reflet des phares dans l'eau, la douceur de la nuit, le goût du café aromatisé à la cardamone, le rêve se poursuit…La nuit sera bonne et courte. |
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