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Ca vous dit, un trek dans les montagnes du Balé ? Cinq jours de marche à des altitudes dépassant les 3000 mètres et frôlant les 4000. Allez, on vous fait grâce des deux longues journées de pistes très difficiles que nous avons dû subir depuis Wenchi, car pour aller dans le Balé, le plus simple c'est de partir d'Addis-Abeba. Quoique la portion Shashemene-Dodola est plutôt abracadabrante, pire ! Redoutable, aventureuse, périlleuse. Avec un peu de chance, un pont tout neuf sera rapidement jeté en travers de la rivière et la piste restaurée.
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![]() Le loup n'est pas là, mais ce chien lui ressemble. |
Malgré les imprévus et l'aventure, nous arrivons à temps à Dodola. Comme à Wenchi, nous avons opté pour l'écotourisme, chapeauté par GTZ. Autre lieu autre lien, cliquez sur l'image. Sitôt les formalités accomplies, les chevaux chargés,
nous voilà parties, à pied cette fois, le long d'un sentier
bordé d'euphorbes en arbres (euphorbia candelabrum ou erythrea). Bonheur, ravissement. Nous gambadons comme des chèvres. Monsieur Seguin n'est pas là, mais les genévriers géants nous caressent de leurs branches. Loup y es-tu ? Nous ne l'intéressons pas. Le loup d'Abyssinie se nourrit essentiellement de rongeurs, rat-taupe en particulier. Il est assez craintif et le temps que l'oeil averti de notre accompagnateur l'ait aperçu, il avait déjà pris la fuite. Allez donc dénicher parmi les touffes brunes de la végétation ce fameux Canis simensis, ce red-fox comme l'appellent les anglophones, qui ressemble davantage à un renard qu'à un loup. Hélas il est en voie d'extinction. Il ne resterait que 400 à 500 individus en Ethiopie et par-là même dans le Monde entier. |
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Tour à tour nous avons traversé des
forêts
d'arbres immenses - genévriers (juniperus procera), bruyères
arborescentes, hagenia abyssinia et ses grappes de fleurs roses - autant
d'arbres qui abritent une multitude d'oiseaux et des colonies de colobes,
ces magnifiques singes en costume noir et blanc avec une longue queue
terminée par un pompon blanc. Ces forêts sont bien entretenues
et exploitées. Les coups de hache des bûcherons résonnent.
Ici et là on peut voir des chèvres à scier le bois
(je ne sais pas si ces tréteaux s'appellent ainsi en Ethiopie),
on rencontre aussi des convois d'ânes chargés de fagots
de bois. |
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Tantôt nous traversons des zones pareilles à des jardins d'ornement. Le sentier serpente entre les massifs de fleurs blanches, immortelles aux pétales luisants sous le soleil (Helichrysum). De part en part, les épis orangés des kniphofia pigmentent le paysage et pour casser la monotonie, pour donner de la hauteur à ces jardins, quelles touffes d'énormes épines, les étonnants, les drôles chardons géants (Echinops ellenbeckii) avec leurs pompons vivement colorés, ronds comme des têtes couvertes d'une brosse de cheveux roux émergeant d'une collerette d'épines. Et enfin celle qu'on attend, car spectaculaire : la lobélie géante (Lobelia rhynchopetalum) dont la fleur s'élève au centre d'une couronne de feuilles coriaces. Quand l'altitude est trop forte, quand la montagne est livrée aux vents et au gel d'hiver, il ne reste plus que des zones arides, à la végétation rase, comparable à nos prairies alpines. Oui, oui, vous avez bien lu, il gèle tout près de l'équateur. Et ce n'est pas pour se réchauffer que les bergers mettent le feu à des pans entiers de montagne. Non, non, cette technique de brûlis favorise la repousse des plantes nécessaires à l'alimentation du bétail. Nous avons croisé de nombreux troupeaux et fait un bout de chemin avec une famille de nomades qui partait avec chèvres et chevaux, vers de nouveaux pâturages.
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Le cheval est un moyen de transport fort utilisé dans cette région. C'est un cheval qui transportait nos sacs et nos provisions de bouche et d'eau. Il est possible d'en louer un à la journée. Josette l'a fait. Du haut de l'animal, sa vue était imprenable. 360° à la ronde. Mais quand l'animal a voulu prendre la tangente, pas facile de lui faire entendre raison. Cependant quand au loin un troupeau de nyalas s'est présenté, elle était aux premières loges, jumelles en main. Ces grandes antilopes ne se laissent pas aborder et préfèrent laisser un bon vallon entre elles et nous.
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Chaque soir une petite maison nous attendait : cuisine-salle-à-manger commune et deux chambres de 4 lits chacune que nous partagions avec un jeune couple d'Allemands. Toilettes et douches dans une cahute à l'extérieur. Fallait se doucher avant le coucher du soleil car après, le froid nous saisissait. Deux couvertures et un duvet n'étaient pas de trop pour adoucir nos nuits entre ces quatre murs disjoints qui laissaient passer le jour et le froid. Dans la salle, un poêle ronflait, alimenté par les paysans du coin. C'est sur d'antiques réchauds à pétrole que nous préparions nos repas. Souvent des pâtes ou de la soupe lyophilisée que nous ingurgitions à la lueur de lampes à pétrole ou de bougies. Inutile de vous dire que les soirées étaient courtes. Et pourtant, comparé aux cases en torchis, toit de chaume et sol en terre battue des locaux, notre hébergement était luxueux. Un soir nous avons commandé du porridge local. Spécial et très nourrissant ce pâté, mélange de plusieurs farines arrosé de beurre clarifié. Contrairement à ce qu'on a pu croire, ce mets au petit matin était bien digéré. Une autre fois, notre choix s'est porté sur du pain et notre petit-déjeuner a été agrémenté de minces galettes noires à la farine de sorgho, me semble-t-il. Pas le tef en tout cas qui, lui, sert à préparer l'injera. Les matins étaient frais, mais tellement calmes, sereins, joyeux avec tous ces oiseaux qui sautillaient, piaillaient, roucoulaient. Les colobes batifolaient à la cime des grands arbres. Les buses augures tournoyaient dans le ciel et brusquement piquaient vers le sol, vers une promesse de repas. Aux premières heures du jour, les paysans étaient debout, la fumée s'échappait des toits de paille, les portes de l'enclos familial ouvertes sur les pâturages. Chèvres et vaches s'en allaient paître en toute liberté.
et bien d'autres oiseaux à retrouver sur le diaporama |
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Le cinquième et dernier jour fut une longue descente jusqu'au village d'Adaba. Peu à peu la forêt disparaît pour faire place aux acacias isolés, à quelques oliviers et euphorbes en arbres. La chaleur se fait plus intense. Passés les champs de céréales, on retrouve la poussière. Cette longue marche nous a permis de côtoyer des habitants se rendant au marché et d'admirer une famille de calaos terrestres, les bucorves d'Abyssinie. Il y avait la mère aux joues bleues, le père aux joues rouges et leur rejeton pas encore différencié. Ces gros oiseaux noirs se déplacent en marchant. Ils ne volent que très rarement. Cinq jours retirés dans les montagnes laissent de bons souvenirs qui aident à supporter le retour à la "civilisation". On n'a guère le temps de se réhabituer, que déjà le bruit, les fumées d'échappement, nous assaillent de toute part. Les enfants aussi nous entourent aussitôt.
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Nous avons dû attendre près de trois heures
avant de pouvoir monter dans un bus et affronter en transport en commun,
cette fois, le retour sur ces pistes dangereuses. Quel folklore ! Un spectacle
dont nous étions les vedettes. Pensez-vous, deux femmes, deux européennes,
et pas de la première jeunesse, avec d'énormes sacs à dos,
coincés sur la banquette arrière du bus. La plus mauvaise
place. On devait se cramponner au siège de devant pour éviter
de décoller et cogner le plafond du bus à chaque cahot. Un
bus surpeuplé, toutes fenêtres fermées, rideaux tirés.
Un véritable étouffoir durant les six heures que compte le
trajet pour atteindre Shashemene, le haut lieu des rastafaris. Dans les 6 heures, il faut enlever le quart d'heure de prière du chauffeur. La région Oromo que nous traversons est essentiellement de religion musulmane. Pendant ce temps, les non musulmans sont descendus du bus pour de multiples besoins et notamment celui de "brouter" le khat. Vous vous rappelez, le khat, cette plante hallucinogène qui se mâche... |
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Modifié le 25/10/18 © Ethiopie 2006-2007-2008. Mireille
Jeanjean. Les textes et les photos édités sur ce
site sont la propriété de l'auteur... |
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