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La route historique, douze jours époustouflants et c'est peu dire. 3000 kilomètres environ dans un décor sans cesse renouvelé, sur des pistes malaisées et poussiéreuses. L'asphalte quand on le retrouve est doux comme un tapis de laine.

Froid, chaleur, pluie : l'altitude fait le climat.

Boisés, ras, rocailleux, les sols partout sont cultivés. Et quand la pente est trop forte, on bâtit des terrasses. Les pierres, ce n'est pas ce qui manque ici et le courage non plus. Des escaliers de géants s'enroulent autour de la montagne.

En mars, la moisson est finie. Les meules, tantôt rondes, tantôt pointues éclairent les champs d'un jaune lumineux. Dans certaines régions, le battage va bon train : à la main ou à l'aide des animaux.
Déjà les laboureurs s'activent, les champs doivent être prêts pour l'ensemencement, les graines mises en terre avant le mois de juin, début de la saison des pluies.

Des hommes, araire sur l'épaule ou guidant les ânes lourdement chargés, des femmes, dos courbés sous le poids des cruches d'eau ou sous les fagots de bois, des enfants de tous âges sur le chemin de l'école quand ce n'est pas bâton en main guidant un troupeau de zébus ou de chèvres. De l'aube au crépuscule un cordon humain avance le long des chemins.

 

 

 

 

 

gota

 

 

marché

 

Jour 1 : Addis, Dessié.

Dès la sortie de la capitale, l'habitat change. De jolies huttes rondes ou carrées surmontées d'un toit de paille au travers duquel s'échappe la fumée du foyer intérieur. Presque partout nous retrouvons ce type de maisons.

Ce qui étonne le plus c'est cette population, hommes, femmes, enfants qui se déplacent le long des routes, des pistes, dans des endroits isolés, escarpés, à des altitudes impressionnantes, à des kilomètres de la moindre habitation.

 

De temps en temps nous traversons une petite ville : Debré Birham entre autres, jumelée avec la ville française de Blanc-Mesnil.
Ces bourgs tombent à pic pour boire un café, déguster une pâtisserie, un plat de spaghetti à la sauce épicée, ou seulement un soda quand la propreté du lieu semble douteuse.

Entre Debré Birham et Kombolcha, la route ne cesse de grimper et soudain dans le froid vif des 3200 mètres d'altitude et la brume des sommets, se découpe une faille : la "fenêtre afar" s'ouvre sur un impressionnant précipice bordé de minuscules fleurs blanches. Hélas le brouillard ne permet pas d'admirer les méandres de la rivière Awash qui serpente au fond de la dépression.
Des enfants se précipitent vers nous pour vendre chapeaux de laine et sachets d'origan des montagnes.


Tout près de là, la route traverse trois tunnels percés à l'époque de Mussolini. Le nom à demi effacé du dictateur italien se devine encore au-dessus de l'entrée du premier tunnel.

La journée se termine sous la pluie. Des trombes d'eau, des cascades de boue coulent le long des falaises. De gros trous s'ouvrent dans l'asphalte, par endroits le goudron est emporté. Des camions renversés dans les boucles de la route. C'est sinistre. Mais rien n'arrête les gens, ils marchent, le bétail avancent avec eux. Les hommes portent un pagne en tissu, certains ont des shorts. Il ne fait pourtant pas chaud dans ces montagnes entre 1800 et 3200 mètres.

Enfin Dessié ! Ironie du sort, l'eau fait défaut à l'hôtel ! On connaît ces éventualités quand on voyage en Ethiopie et les lingettes, abhorrées quand je suis en France, me sont ici d'un grand secours.

   
   

Jour 2 : de Dessié à Lalibela

La pluie de la veille a fait le grand nettoyage et les couleurs matinales en sont renforcées. Une mosaïque de carrés de terre couvre le fond de la plaine, d'autres lopins cultivés s'étagent en terrasses sur les flancs des montagnes en épousant les contours de la pente. Entre les murets de pierres volcaniques, c'est toute une gamme de bruns, roux, verts qui émaille le paysage.

Il n'est que 7 heures, mais il n'y a pas de répit pour ces paysans qui longent déjà la route, accompagnés de leurs bœufs, et des outils nécessaires au labour. Ici une fillette porte l'araire sur l'épaule, là un garçonnet transporte un fagot de bois tout en menant le troupeau de chèvres. Un dimanche bien laborieux.


Des femmes aux cheveux finement tressés près du crâne et lâchés en touffe vaporeuse sur la nuque marchent, le corps drapé dans un châle blanc, un grand parapluie en guise d'ombrelle qui protège aussi le bébé endormi dans son dos. Où vont-elles ainsi à longueur de journée ?

 

Ici et là, sur les accotements, abandonnés à la rouille, des chars témoignent des rudes combats de 1991.

 

Sur leurs légères barques de papyrus, des pêcheurs jettent leurs filets dans les eaux bleues du lac Hayk (hayk signifie lac en amharique). Sur la grève, une colonie de marabouts espère grappiller un repas.



Plus loin Wichalé où Ménélik II signa un traité avec l'Italie, délimitant la frontière entre l'Ethiopie et l'Erythrée à cette époque colonie italienne.

Plus au Nord, la ville de Weldiya marque le départ de la route chinoise qui relie l'Est à l'Ouest jusqu'à Wereta, près du lac Tana.

La piste vers Lalibela grimpe sur les hauts plateaux. 1400 mètres de dénivelée et 20 km pour atteindre une étendue désolée, un espace rocailleux livré au vent. A mi-pente, une eau sacrée ruisselle. Les conducteurs s'arrêtent pour s'asperger d'eau bénite, déposer leur obole dans le petit autel et s'assurer d'un bon voyage.

 


Un peu plus loin, première rencontre avec une famille de babouins geladas à la poitrine rouge sang caracole dans les escarpements de la falaise. Une dernière vue plongeante sur les lacets de la route, sur le fond de la vallée et nous voilà sur le plateau.


Ici tout est minéral et on se demande ce que peuvent bien trouver pour se nourrir, ces animaux qui pâturent entre les roches. Quelques maisons en pierre disséminées sur le plateau. L'air est vif. Les rares personnes rencontrées sont emmitouflées dans des couvertures ou des châles épais.


La piste de Dilb nous conduit à Lalibela et sans attendre nous visitons l'église de Naakuto Lab, construite à l'intérieur d'une caverne. L'eau sacrée qui coule de la voûte depuis des siècles a creusé les pierres. Bénitiers naturels.
Le prêtre montre ses trésors : peintures, manuscrits en guèze et richement enluminés, encensoirs, croix, couronnes...

 

 

On s'installe pour deux nuits dans un joli hôtel entouré d'arbres et de fleurs où viennent jouer une multitude d'oiseaux. La douche coule le froid et le chaud, le restaurant est bon et la bière, la Saint Georges, est une heureuse découverte.


Anciennes maisons de Lalibela

 

Masresha Misganaw
son site avec ses coordonnées


 

Mas sait aussi prendre des photos

 

Vous pouvez lire ou passer directement au diaporama de Lalibela

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le plafond de bieta Maryam

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jour 3 : Lalibela

A 700 km d'Addis-Abeba, 2600 m d'altitude, sur un plateau aride entouré de montagnes, se trouve l'ancienne Roha. Rebaptisée Lalibela ("Les abeilles reconnaissent sa souveraineté"), du nom du roi éthiopien qui fit tailler dans le tuf, à la fin du XIIe siècle, 11 églises.
Le site est en quelque sorte la reconstitution de Jérusalem. Le Jourdain, la colline des 7 oliviers, le Sinaï, le Golgotha… Tout y est. Les fresques sur les murs illustrent l'ancien et le nouveau testament : la nativité, la fuite en Egypte… Et tout cela conservé depuis plus de 800 ans. Outre l'iconographie, il n'est pas rare de trouver des gravures en creux ou en relief, croix, étoile de Salomon… Ville sainte de l'Ethiopie, Lalibela accueille des milliers de pèlerins lors des grandes fêtes chrétiennes orthodoxes.

 

Mas, guide francophone officiel, va nous conduire dans ce labyrinthe qu'est Lalibela et nous apportera toutes les précisons propres à chacun des édifices. On ne compte pas les tranchées, les tunnels plus ou moins longs, plus ou moins étroits et bas, les portes dérobées, tout un système pour aller d'un sanctuaire à l'autre au-dessous du niveau du sol. Et tout ça sans se mouiller les pieds, même en saison de pluie, grâce aux plans inclinés et systèmes de canalisation. Les pieds parlons-en ! Onze fois ni plus ni moins nous avons dû poser nos souliers avant de pénétrer dans les lieux saints.

 

 

Des églises extraites de la terre, il faut voir ça ! Le monument a d'abord été excavé, un bloc brut, ensuite les façades ont été travaillées et font apparaître pilastres, corniches, piliers, fenêtres, portes. Certaines fenêtres sont aveugles. Celles qui ont été percées ont permis d'évider le bloc et de pénétrer dans le roc afin de modeler les volumes intérieurs: coupoles, voûtes, plafonds, arcs, piliers, nefs, chapiteaux, colonnes, tout ce qu'on peut voir dans une basilique. Le sol est généralement incliné pour permettre l'évacuation de l'eau. De petits canaux courent entre les différents blocs, canalisent l'eau vers des bassins, des citernes ou directement dans le grand canal qui sépare les deux groupes d'églises et qui n'est autre que le Jourdain.

Deux groupes d'églises : les églises du Nord et les églises du Sud séparées par le Jourdain et une église isolée: Biéta Ghiorghis.

Biéta Ghiorghis, la maison de Saint-Georges, est de loin la plus impressionnante.
A l'écart des autres, il faut grimper sur le plateau pour voir ce monolithe de 11 m de haut se dresser dans une excavation profonde de 12 m. Quelle féerie quand les derniers rayons ravivent le grès rose de ses murs, ombrent les nuances de lichens qui l'habitent depuis 8 siècles et dégagent avec netteté l'imbrication en creux et en relief des croix qui ornent son toit.
Taillé en forme d'une croix grecque le monument offre 12 façades. Dans la partie supérieure, les fenêtres ogivales, surmontées d'une palme et d'une croix, s'ouvrent sur la cour fermée aux murs percés de trous. Autrefois tombeaux, parfois abris pour les pèlerins, ces niches sont aussi occupées par des moines ermites. On entre dans l'église par un escalier de 7 marches. Comme à l'extérieur, l'intérieur est en forme de croix. Au rez-de-chaussée, les fenêtres sont aveugles (l'église étant considérée comme l'Arche de Noé, il fallait éviter que le flot n'entre en son sein).
Les portes sont ornées de "tête de singe". Détail architectural qui laisse apparaître une poutre à chaque angle.

Biéta Ghiorgis

Ermite autour de Medhane Alem


Groupe du nord :
- Biéta Medhane Alem, la maison du Sauveur du monde, la plus grande, contient 5 nefs et trois fosses symbolisant les tombeaux d'Abraham, d'Isaac et de Jacob
- Biéta Maryam, la maison de Marie reliée à Biéta Medhane par un tunnel. Au niveau supérieur, 7 fenêtres, 7 chambres symbolisant les 7 ciels
- Biéta Maskal, maison de la croix
- Biéta Denaghel, maison des Vierges Martyres décapitées au IVe siècle à Edesse sous l'empereur romain Julien Apostat.
Une profonde tranchée symbolisant le passage de la Mer Rouge, longe cette église.
- Biéta Debré Sina, maison du Mont Sinaï, encore appelée Biéta Michaël aux chapiteaux décorés de croix
- Biéta Golgotha contient de tombeau du roi Lalibela. Cette église, interdite aux femmes, est accessible par l'intérieur de Debré Sina. Aucune fenêtre, aucune paroi ne donnent sur l'extérieur.
De là, une autre tranchée, qui symbolise la traversée du désert, mène au tombeau d'Adam.

Medhane Alem

Bieta Maskal et cour de Bieta Maryam

Bieta Denaghel, Debre Sina-Golgotha-Tombeau d'Adam, la croix de Lalibela

 


Groupe du sud :
- Biéta Gabriel et Raphaël qui surplombe le Jourdain.
Le Jourdain a été creusé en même temps que les monuments car pour créer ce site d'une seule pièce, il fallait penser à l'écoulement des eaux de pluies, des alluvions, en plus de vouloir reconstituer en terre africaine une deuxième Jérusalem.
- Biéta Emmanuel d'où un tunnel très sombre où l'on risque à chaque instant de se cogner la tête, nous conduit à biéta Mercurios
- Biéta Abba Libanos
et le Bethléem qui est l'endroit où le pain de cérémonie était préparé en grand secret.

Bieta Gabriel et Raphaël

Bieta Emmanuel , Libanos, le Bethléem

 

Dans les églises, des tentures dissimulent les passages interdits comme l'accès au Saint des Saints, protègent certaines fresques de la lumière ou en interdisent la vue, comme à bieta Medhane Alem. En effet, selon la légende, le Seigneur est apparu appuyé contre le premier pilier de l'église. Il y aurait laissé des traces, des inscriptions susceptibles de disparaître pour toujours si un seul regard se pose sur elles.
Au sol des tapis, des nattes ou simplement de la paille recouvrent la roche. Accrochées à différents endroits, de clinquantes horloges indiquent des heures fantaisistes. Ici et là, pêle-mêle, des bâtons de prière, des cistres et des tambours attendent l'heure. Des parapluies, cadeaux des fidèles aux prêtres, espèrent une cérémonie prochaine pour déployer leurs couleurs vives et leurs brillants. Et partout les prêtres se prêtent à la séance de photos avec dans leurs mains croix et manuscrits anciens. En échange de quoi une pièce, un billet, pour améliorer l'ordinaire.

Après cette journée culturelle bien remplie, nous nous retrouvons autour d'un tedj, le bon tedj de Lalibela. C'est une sorte d'hydromel, une boisson fermentée à base de miel. Alors à Lalibela, ville des abeilles, le tedj ne peut qu'être délicieux.


 

 

Extrait de Éthiopiques 5 - Tigrigna Music_ Tigray_Eritrea,
1970-1975

Tsèhaytu Bèraki chante Aminèy

 

Jour 4 : Lalibela - Addi-Abbi


En route pour le Tigré et ses églises rupestres, creusées dans les falaises. Des centaines de sanctuaires, certains interdits aux femmes. Il y a aussi ceux qui se visitent après de vertigineuses ascensions.

La piste traverse de magnifiques paysages : montagnes tabulaires, plateaux caillouteux, filons de marbres qui font miroiter les pentes entre quelques rares buissons rabougris. On entre peu à peu dans le massif du Tembien. Sec. Sec et désert. Des kilomètres de piste sans rencontrer âme qui vive, ni véhicule, ni piéton. Seuls de petits calaos posés sur la chaussée et de gros babouins geladas découvrant leur poitrail rouge comme pour nous montrer leur force.

 

Bilbala Giorgis, l'église des abeilles, ainsi nommée car plusieurs essaims ont élu domicile dans des trous du sanctuaire. Chaque année le miel sacré est récolté. Devant la façade de l'église caverne, une foule compacte récite et chante des louanges au Seigneur. L'église est trop petite pour accueillir autant de monde. Quelques personnes entrent à tour de rôle pour recevoir la bénédiction du prêtre. Un mendiant aveugle est assis contre un pilier. Il y a beaucoup de miséreux autour des lieux saints et on ne peut guère les soulager. C'est souvent difficile à supporter.

 


Dans un champ en bordure de route des militaires en manœuvre dressent des canons. Addi-Abbi, est tout proche, à quelques encablures de la gueule de ces armes.
On verra beaucoup de militaires les jours qui viennent, beaucoup d'observateurs de l'ONU aussi. Cette région du Tigré est toute proche de la frontière avec l'Erythrée.

         

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jour 5 : Abbi-Addi, Mekele, Wukro, Adigrat


On ne quitte pas Abbi-Addi sans un détour pour voir Gabriel Wukien et Abba Yohanni.

Gabriel Wukien, situé sur le versant de la montagne Debré Ansa, parmi les euphorbes géantes, les buissons fleuris et autres arbres majestueux dans lesquels piaillent une multitude d'oiseaux. Un joli sentier parsemé de pierres multicolores grimpe vers la petite église semi troglodytique. Le prête n'est pas là. Qu'importe, l'entrée est interdite aux femmes. Nous repartons, escortés par une troupe joyeuse d'enfants, petits bergers qui courent pieds nus dans les caillasses du chemin, s'accrochent à l'arrière de la voiture.

 

Gabriel Wukien


Abba Yohanni semble suspendu au milieu d'une falaise de grès rose. La légende raconte que le petit Yohanni a été abandonné par sa mère, au bord de la falaise. Des aigles l'ont sauvé et nourri. Devenu adulte, il construisit le monastère pour y prier le restant de sa vie. Nous sommes restées au pied de la falaise, non par peur car un sentier conduit à l'édifice, mais parce que ce lieu, est interdit aux femmes.

Abba Yohanni


Retour en arrière, vers Mekele et la grande route, celle qui mène à Asmara, capitale de l'Erythrée. Les églises du Gueralta et du Hausien méritent bien ce détour. Mais il faut faire un choix, on ne peut pas tout voir.

Qirqos, l'église rupestre de Vukro. Passée la façade jaune, on pénètre dans le roc de grès rouge. Majestueuse église à trois nefs, aux piliers cruciformes surmontés d'arcs, aux plafonds sculptés de croix.

 

Qirqos

 

Abreha et d'Asbeha ou Debra Negast (monastère des rois). Semi monolithique, le bâtiment est taillé dans le grès rouge. Dès le seuil, on reste muet d'admiration devant les peintures qui couvrent tous les murs, et les plafonds, l'intérieur du grand portail même présente un portrait sur pied des deux frères Abreha et Asbeha. Sous la voûte, 7 fenêtres représentant les 7 ciels et un peu partout, des chérubins aux grands yeux noirs.

 


Abreha et d'Asbeha


Adigrat, "Pays des champs" en langue tigréenne. De l'hôtel Eve au restaurant Gesa Geresalé, il n'y a que la rue à traverser. Toucoul joliment décoré d'objets traditionnels, nourriture excellente. Nulle part les tibbs ont été aussi bons. Huit mois après, j'en ai l'eau à la bouche.

 

A l'approche d'Adigrat

       

 

 

Des fermes au pied de la falaise

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ecritures découvertes à Yeha

 

Ibex

 

Jour 6 : Adigrat, Yeha, Axoum

Les journées sont trop courtes, le soleil se couche trop tôt. Hier nous n'avons pu visiter Petros et Poulos ni Mikaël Melhaizengi.
Ce matin donc, retour à Frewini.

Petros et Poulos : quelle expédition pour accéder à cette église désaffectée, suspendue au milieu d'une paroi verticale. Quelques encoches pour poser les pieds, quelques prises pour les mains sur la roche qui s'effrite en millier de grains blancs.
Tout petit sanctuaire en partie excavée, en partie construit, qui présente quelques peintures anciennes. Il fallait les mériter. Et la descente ! brrrrr…Heureusement, j'avais St Georges avec moi. Je me suis ralliée à lui, sa bière est si bonne !


Petros et Poulos

l'escalade


Tout près de là, Mikaël Melhaizengi. L'église est taillée dans un rocher, sur un promontoire planté d'euphorbes géantes, d'eucalyptus et d'oliviers. Le prêtre attendait assis à l'ombre des arbres. Joli sanctuaire aux plafonds sculptés. Le prêtre dévoile un manuscrit ancien. Des bâtons de prière posés au sol, dans une fenêtre cistres et autres instruments attendent la prochaine cérémonie religieuse.


Fresques, bâtons de prière, manuscrit


La piste Adigrat-Axoum traverse de magnifiques paysages. Des vues splendides sur le massif de l'Adwa où aiguilles, pitons, couleurs, escarpements, orges basaltiques semblent s'être donné rendez-vous pour nous. On comprend pourquoi cette région a été le siège de rudes combats.
Passages de gorges profondes aux pieds de falaises vertigineuses. Au loin on aperçoit la montagne tabulaire qui abrite le monastère de Debré Damo. Interdit aux femmes, détour inutile.

 

Paysages


Le détour sera pour le temple de Yeha (ruines d'époque pré-axoumite, 5 siècles avant JC). La plus ancienne construction sur le sol éthiopien, aurait été édifiée par des Sabéens venus du Yémen. Le musée recèle des pierres gravées en sabéen, grec et guèze.
Encastrés dans la façade de l'église, des bas-reliefs en bois, provenant du temple et figurant des têtes d'ibex.



Malgré ses 2100 m d'altitude, il fait chaud à Axoum et les moustiques se plaisent à taquiner notre nuit. Heureusement sans risque pour notre santé.


* Dernière nouvelle : Depuis le mois d'août 2008,
l'obélisque est à nouveau dressé sur son emplacement
d'origine. Cette opération longue et délicate a été
menée à bien grâce à une coopération technique
étroite entre Italiens et Ethiopiens, et le soutien de
l'UNESCO. L'inauguration a eu lieu le 4 septembre 2008.

 

 

Pour en savoir plus sur Axoum, ses origines...
un texte de Jean-François Breton, directeur de recherche au CNRS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jour 7 : Axoum - Shiré

Axoum, royaume de la légendaire reine de Saba (Makeda en Ethiopie, Reine du Midi dans les Evangiles, Bilqis dans le Coran) et du roi Salomon... Axoum, berceau du Christianisme en Ethiopie... On y parle aussi de Gudit, reine juive qui aurait persécuté les Chrétiens...

Très animée, cette ville de 30 000 habitants, tout au Nord du pays.

 

 

Le Champ des stèles, comme son nom l'indique est un terrain "planté" de monolithes dont le plus haut est celui d'Ezena. D'autres, non moins imposants gisent au sol. L'un d'entre eux, brisé en cinq morceaux et sculpté sur ses quatre faces, n'a jamais été érigé. L'autre sectionné pour des raisons de transport, vient d'arriver d'Italie où il avait été emporté en1937 par les armées de Mussolini *.
Sur les grandes stèles, on retrouve les "têtes de singe" déjà vues à Lalibela.
Des fouilles se poursuivent au pied d'un arc taillé dans un seul bloc de pierre. Ici l'accès à un tombeau, là… Que de choses à découvrir encore dans cette région d'Abyssinie.

 

Champ des stèles, terrain de fouilles

 

Près de l'ancienne Ste-Marie de Sion, exposition de croix et de couronnes, trésor de l'église.
C'est tout près de là dans une petite chapelle que serait conservée l'Arche d'Alliance. Un gardien à vie la surveille, un prête qui vit là en reclus.

 

Ste-Marie de Sion

 

La nouvelle Ste-Marie de Sion contient d'anciennes peintures, ainsi qu'un manuscrit aux belles enluminures.

Fresque et manuscrit ancien


Axoum c'est aussi les tombeaux de Meskal et de Kaleb, un peu à l'écart de la ville. Monter à pied jusqu'à la nécropole permet de voir les vieilles maisons, de croiser des gens, ceux par exemple qui vont puiser de l'eau, laver ou se laver dans le bassin de la reine de Saba. Plus loin, dans une cabane au bord d'un champ, une pierre gravée découverte par un laboureur. La pierre "d'Ezena" montre des inscriptions en sabéen, guèze, grec. On pense évidemment à la pierre de rosette.

                                    Bains de Saba


Deux kilomètres avant d'arriver sur le promontoire où sont les tombes des rois axoumites. Il fait chaud et s'enfoncer dans le sol, c'est trouver la fraîcheur des chambres funéraires. Il n'y a rien d'autre, sauf, ici et là quelques inscriptions, des croix gravées dans la pierre et …. des chauve-souris... pas d'époque.

 

Chauves-souris

 

Le tunnel, nous ne l'avons pas emprunté, d'ailleurs l'entrée est condamnée. Et puis marcher 180 km sans voir le jour, pour atteindre l'Erythrée, non merci ! Pourtant, il serait bon de vérifier. Légende ou histoire ?

       
   

Jour 8 : Shiré - Gondar

6h à Shiré. La ville se réveille; il fait encore nuit. Une caravane de dromadaires chargés de bois s'ébranle en grand silence. Hommes et femmes commencent leur marche. Vers où ? On se le demande.

Lever de soleil à Shiré

L'Est pâlit, rosit, s'éclaire. C'est le premier lever de soleil du voyage. Et c'est beau. Je prends beaucoup de photos, tout en roulant, ballottée par les chaos de la piste.
La piste est mauvaise jusqu'à Debark. Les paysages époustouflants.

Descente vertigineuse vers le fleuve Tekkézé et le nouveau pont en construction. On croise de nombreux soldats dans cette région sensible où une révolte tigréenne, sévèrement réprimée par les armées du Derg, eut lieu dans les années 90. Les engins militaires sont là, abandonnés le long des routes, précipités en contrebas. Témoins rouillés de la violence des combats. Insolite terrain de jeu pour les enfants comme celui qui trône à l'entrée de Shiré.

Char


La chaleur est forte tout au fond de la gorge et on attend la remontée vers les plateaux pour retrouver un peu de fraîcheur.
Et elle grimpe la route, offre une vue panoramique, un balcon sur les massifs du Tsellemti et du Simien plus au sud et du massif de l'Awasa au nord-ouest. Les crêtes se découpent dans la brume de chaleur. Des pics volcaniques, des sommets tabulaires, des tours, des aiguilles… On croirait un décor construit par un géant, un titan, des vestiges de cités gigantesques issues d'un autre monde. Les oiseaux ont élu domicile dans ce tableau : calaos nains, pintades, rollier d'Abyssinie, tourterelles…. Et même un petit singe gris, un vervet qui se dégourdissait dans les branches d'un arbre. Des arbres à encens sont disséminés sur les pentes arides.

 

Paysages tourmentés à perte de vue

 

Isuku.... 4x4 Land Cruiser et Camel 4 pattes


Boswellia sacra, l'arbre à encens           Ruche dans cet arbre


C'est après une spectaculaire montée (40 km et 2000 m de dénivelée) que nous arrivons à Debark, point de départ des randonnées dans le Simien.

Après Debark, la route traverse de jolis plateaux où paissent ovins, bovins, où gambadent les chevaux. C'est vert, de petits ruisseaux serpentent, des mares s'alanguissent, des acacias et de grands eucalyptus semblent veiller sur la paix du lieu. C'est frais, presque froid, on s'croirait dans un p'tit coin bien d'chez nous.



Avant Gondar, les Falachas sont là, le long de la route, des femmes qui vendent leur artisanat.


 

 

 

 

 

 

 

 

    Cliquez sur le guêpier et envolez-vous vers le monde des oiseaux


 

Jour 9 : Gondar - Bahar Dar

Capitale du pays au XVIIe siècle, Gondar était la cité impériale des rois Fasilades. Dans un environnement verdoyant et bruissant d'oiseaux, on peut admirer les vestiges encore bien conservés pour certains, de ces magnifiques châteaux fortifiés qui dressent leurs pans de murs, leurs tours, leurs créneaux en pierre. On y reconnaît une influence portugaise. Fasilades, Yohannès, Yassou, Dawit, Mentwab, Bakafa, ont régné et construit au fur et à mesure de leur règne, palais, chancellerie, bibliothèque, salle de banquet, écuries, cage aux lions, maison de chant, et de nombreuses dépendances comme les bains, les cuisines, la maison des fileuses….

Fasilades , Chancellerie et bibliothèque , Yassou

Fasilades , cage aux lions , Mentwab


A proximité on ne manque pas de visiter les bains de Fasilades. Un bâtiment à deux étages, un vaste bassin, de grands arbres, genévriers entre autres aux racines impressionnantes qui semblent vouloir avaler les murets qui entourent le réservoir. Autrefois lieu de détente, ce bassin est de nos jours rempli une fois l'an pour le traditionnel bain de la fête de Timkat qui commémore le baptême du Christ.


Bains de Fasilades


On ne quitte pas Gondar sans visiter l'église Debré Birhan Selassié (église de la trinité). Magnifique iconographie. Le plafond entièrement peint de visages de chérubins aux yeux écarquillés, qui n'ont de cesse de vous suivre du regard. Des murs couverts de scènes de la vie du Christ et de Marie. Au-dessus de la porte, on découvre avec étonnement, Mahomet enchaîné sur son dromadaire et emmené par le diable.

Debré Birhan Sélassié



Miracle, la route jusqu'à Bahar-Dar est asphaltée ! J'avais oublié que ça existait !
Toujours et encore de magnifiques paysages, des pic volcaniques isolés, le Doigt de Dieu entre autres. La route descend avec une forte pente et malgré les mises en gardes, les accidents se produisent. Camions renversés sur le bord de la route et même un car au fond du ravin. Et toujours les tanks rouillés…

 

Paysages

Avant Bahar-Dar, un petit lac est habité d'une foule d'oiseaux. Il y a là des oies, des hérons, des ibis, des canards, des aigrettes tout un monde pataugeant, volant, mangeant et surveillant les intrus qui piétinent leur territoire.


De petits oiseaux colorés attendent sur les fils qui longent la route. J'apprendrais plus tard que ce sont des guêpiers.

Traversée du Nil Bleu, tout juste sorti du lac Tana, sa source et nous voilà dans la ville.


Nil Bleu , pélicans du lac Tana

C'est au bord du lac que nous dénichons un joli petit hôtel. Un lac où nichent de nombreux pélicans. Notre chambre ouvre sur le jardin et la terrasse du bar. Jamais je n'ai mangé d'aussi bons tilapias.

       

Ancienne fresque

 

 

 

 

 

 

Le joueur de flute

 

Jour 10 : Bahar-Dar

Matinée en bateau, vers la péninsule de Zhegué et la visite de l'église de Uhra Kidane Mehret. Bel édifice circulaire au toit de chaume; une galerie couverte court tout autour. On y trouve d'imposants tambours utilisés lors des cérémonies. L'iconographie, riche et intéressante. A côté des scènes bibliques, on peut voir des tableaux historiques. Le diable est aussi présent, de même Saint-Georges terrassant le dragon du haut de son cheval blanc. Un très beau Abouna Gebré Menfas Kuddus avec sa longue barbe debout au milieu de ses fauves. L'ensemble de ces peintures forme une immense bande dessinée qui court tout autour du Saint des Saints au centre de l'église.…. Accrochés très haut et à l'abri de la lumière, d'anciennes peintures, très belles, en partie restaurées.


Kidane Merhet                                  Abouna

Instruments


De retour, on musarde le long des berges couvertes d'une abondante végétation remplie d'oiseau et surprise, des hippopotames tête hors d'eau. Nous croisons un pêcheur sur sa barque en papyrus. Le lac étant infesté de bilharziose, nous ne nous baignerons pas, ni ne laisserons nos mains se rafraîchir dans l'eau.


Hippopotames , Pêcheurs


Dans l'après-midi, une visite au site de Tis Issat (l'eau qui fume). C'est là que le Nil Bleu (Abay en Ethiopie) quand il coule, tombe d'une hauteur de 400 m. Chance extraordinaire, le barrage est en arrêt et les chutes sont magnifiques dans les rayons rasants du soleil presque couchant. La falaise est cachée par l'eau rageuse qui "fume" en atteignant le sol.


Chutes du Nil et le pont des portugais


Vue du pont portugais, la gorge n'est pas très remplie. La saison des pluies n'a pas encore commencé. Un garçonnet est venu s'installer sur le parapet. Il attend notre retour en jouant de son "roseau". Plein de charme, il ne réclame rien et pourtant on ne peut s'empêcher de donner quelques birrs pour sa jolie mélodie et la grâce de son sourire. Sur le chemin du retour, on ne manque pas d'observer quelques variétés d'arbustes : l'arbre à calebasses, l'arbre à fruits jaunes comme des citrons qui servent au tannage des peaux. Et toujours les oiseaux multicolores.



Enseignes de boutiques

 

 

Saint Takla Haymanot

 

 

Jour 11 et 12: Bahar-Dar ; Debré Marcos ; Addis-Abeba

Voilà c'est fini, deux jours pour rentrer, à cause des travaux dans les gorges du Nil. Nécessité de passer avant 10 h, heure de la fermeture du pont.

Debré Marcos, peu d'intérêt mis à part le contact avec les nombreux enfants

 

 

6h quand on démarre de Debré Marcos. La nuit est encore là. La route est impressionnante après le plateau. Une descente vertigineuse dans les gorges. Il fait très chaud, c'est aride. La végétation est quasi inexistante. Un incendie est passé par là, des traces subsistent, de larges plaques de cendres blanches, certaines fument encore. De nombreux soldats sillonnent le lieu. L'autorisation de faire des photos nous est refusée. Quelle importance de prendre le fleuve ? Mais c'est ainsi, on ne photographie pas les ponts. Et là il y en a deux. L'ancien qu'on emprunte et le nouveau en construction.

La remontée sur l'autre versant est tout aussi spectaculaire. Des travaux rendent certains passages dangereux. Mais c'est beau et là-haut on retrouve la fraîcheur.

Une toute dernière visite : le monastère de Debré Libanos. Mais va-t-on pouvoir pénétrer sur le site ? Les restrictions sont sévères, écrites en toutes langues : mesdames, vous ne devez pas avoir vos menstrues, messieurs-mesdames vos rapports sexuels doivent dater de 48 h au moins. J'ai oublié la troisième clause.

Une foule de miséreux se pressent autour du sanctuaire et le long du sentier qui mène à la grotte où l'eau sacrée jaillit et où vécu Saint Takla Haymanot. Vivre est une façon de parler car la légende dit qu'il pria, debout sans manger, ni boire, ni dormir pendant des années. A la fin, son fémur se détacha. Il continua de prier sur une seule jambe.

 

La grotte

Avant de reprendre la route, on tombe sur une colonie de babouins geladas. Pas très contents de voir ces admiratrices un peu trop exubérantes. Alors ils grognent, découvrent leurs dents avant de s'éloigner en montrant leur derrière. Sans blagues, on ne rit pas quand on s'appelle babouins et qu'on a toute une troupe de femelles et de rejetons à protéger !

 

Gelada et son petit
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Le long de la route, c'est toujours le même spectacle : travaux agricoles, marchés et les "hommes qui marchent".

Battage                   Vanneuses

 

A l'approche d'Addis, le paysage s'adoucit. On rentre en ville quand les étudiants sortent de cours. Ici le bleu et rouge est de rigueur

 




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Modifié le 25-Oct-2018

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